Les relations entre les Occidentaux et l’égyptien Anouar el-Sadate et l’image véhiculée de garant de la paix par ce dictateur doivent nous interroger sur notre vision du monde.
Le 28 septembre 1970, après la mort de Gamal Abdel Nasser, en sa qualité de vice-président, il devient président de la République par intérim. Le 15 octobre 1970, il est élu président de l’Égypte suite à un referendum où il obtient 90 % des voix.
Décidé à rompre avec l’alliance pro-soviétique, il choisit comme chef de gouvernement un pro-américain et fait renvoyer les conseillers militaires soviétiques d’Égypte le 18 juillet 1972. Par ailleurs, la religion obtient de nouveau une place prépondérante dans la société égyptienne. La loi islamique, la charia, devient la source de législation de l’État.
En 1973, il lance la guerre du Kippour. Malgré la victoire militaire d’Israël, les combats redorent l’image des nations arabes. Le sentiment général qui prédomine dans le monde arabe, et notamment en Égypte, est, paradoxalement, celui d’une grande victoire. Les Égyptiens ont de nouveau mis un pied dans le Sinaï, après en avoir été chassés en 1967. Anouar el-Sadate tire profit de cette situation et devient, à la suite de son rapprochement avec les Américains à la fin de la guerre du Kippour, un interlocuteur privilégié dans la région. Les Soviétiques perdent du coup un de leurs alliés et la Syrie reste le dernier pays de la zone à leur être encore favorable.
Le monde arabe sort grandi de cette guerre car il a prouvé, grâce au soutien militaire d’une dizaine de pays de la région, dont l’Algérie, l’Irak ou la Jordanie, qu’il pouvait compter sur ses différents membres dans les moments difficiles. Le pétrole, utilisé comme une arme, lui a aussi permis de donner une tribune internationale à ce conflit en obligeant les superpuissances américaine et soviétique à intervenir. En Israël, même si la guerre a été gagnée militairement, elle a coûté la vie à 3000 soldats, et le gouvernement se voit reprocher de ne pas avoir suffisamment anticipé l’attaque égypto-syrienne et d’avoir ainsi mis le pays en très fâcheuse posture pendant les tout premiers jours du conflit.
En novembre 1977, Sadate devient le premier dirigeant arabe à effectuer une visite officielle en Israël. Il y rencontre le premier ministre Menahem Begin, et prend la parole devant la Knesset à Jérusalem. Il effectue cette visite après avoir été invité par Begin et recherche un accord de paix permanent. Beaucoup d’autorités du monde arabe réagissent très défavorablement à cette visite, du fait qu’Israël est alors considéré comme un état « voyou » et un symbole de l’impérialisme.
Le 17 septembre 1978, les accords de Camp David sont signés, pour lesquels Sadate et Begin reçoivent le prix Nobel de la paix.
Sur le plan intérieur, les effets simultanées des réformes économiques d’inspiration capitaliste et la référence de plus en plus marquée à l’islam rendent la gouvernance du pays de plus en plus difficile. Ne voulant pas voir l’islam politique prendre le pas sur l’islam coutumier, Anouar el-Sadate purge l’organisation des Frères musulmans ainsi que toute forme d’opposition.
Sadate est assassiné durant une parade militaire filmée au Caire par des membres de l’armée qui appartiennent à l’organisation du Jihad islamique égyptien.
50 années plus tard, la situation de l’Egypte semble ne pas avoir changé.
Comme pendant la période Anouar el-Sadate, après les années Moubarak, le règne du maréchal Abdel Fattah al-Sissi et les Occidentaux perpétuent ses paradoxes.