Résumé
Dès l’incipit, le lecteur est plongé au coeur de l’intrigue centrée sur Mademba Sèye qui a vécu les premières phases de la domination coloniale au cours desquelles il est parti, avec l’aide de ses parrains français, d’un statut de simple commis des postes, comme télégraphe, à celui de roi africain (en Bambara, Fama). En 1900, moins d’une décennie après la conquête par les Français d’un vaste hinterland de l’Afrique occidentale française, Fama Mademba Sèye, un sénégalais né dans la ville coloniale française de Saint-Louis du Sénégal, nommé roi des Etats de Sansanding et des Dépendances sur les rives du fleuve Niger, se retrouve assigné à résidence dans la capitale coloniale à Kayes au motif qu’il aurait systématiquement abusé de son pouvoir, commis des meurtres rituels, violé d’innombrables femmes et extorqué d’importantes richesses à ses sujets.
Alors, Mademba écrit au Gouverneur général de l’Afrique occidentale française pour demander qu’on lui donne la possibilité de se disculper devant un tribunal français. Ce qui lui est refusé : « Il n’est nullement question que le cas de Mademba soit porté devant un tribunal français ». Pour le Gouverneur général, » l’affaire Mademba (…) est à la fois plus délicate et plus grave qu’il n’y paraît « . Pourquoi le Ministre des Colonies avait-il alors si peur de laisser Mademba tenter de se disculper devant un tribunal français ? Qu’est-ce qui a rendu cette affaire si « délicate » et si « sérieuse » ? Et que révèle cette affaire contre Mademba sur les points d’intersection entre le colonialisme et l’Etat de droit ? Dans la reconstruction de la biographie de Mademba, l’auteur révèle qu’à son grand regret Donald Trump en campagne à la présidence des USA a été sa muse.
En effet Trump et Mademba partagent des traits similaires : le même narcissisme et la crainte de l’insécurité, la misogynie, la maltraitance des femmes, le poids des parrains pour construire la légitimité de leur autorité, un personnage en constant bricolage En décryptant la façon dont les Africains ont vécu les grandes transformations du colonialisme par le » remake » de Mademba, la » voix » auctoriale n’est pas toujours seule à se faire entendre.
En effet, l’auteur s’efface souvent et se tait pour céder sa place à un narrateur tout différent de lui, ce même narrateur se trouve également amené à laisser la parole aux protagonistes de son propre récit. Ainsi, grâce aux subtilités inhérentes au discours rapporté, le texte laisse entendre la voix des protagonistes dont les propos sont cités, transposés ou narrativisés. Cette gestion de la polyphonie donne au texte un style original, voire captivant.
Richard Roberts est professeur d’histoire à l’université de Stanford, éminant spécialiste de l’esclavage en Afrique, il est l’auteur de plusieurs ouvrages reconnus internationalement.
Détails produit : broché, grand format.